Douze mille soldats, 500 véhicules militaires, 200 avions : une parade du superlatif au cœur du pouvoir central sur la place Tiananmen a lieu jeudi 3 septembre, à Pékin. Un défilé militaire qui commémore le 70e anniversaire de la fin de la guerre et qui est l’occasion pour la Chine d’afficher sa puissance sur la scène mondiale.
Le Parti communiste veut maîtriser le moindre détail jusqu’à la météo. Pour jeudi, on nous annonce déjà un ciel bleu azur au lieu de la grisaille habituelle. 2000 usines et 450 chantiers ont reçu l’ordre d’arrêter toute activité. Un véhicule sur deux est interdit de circulation. Le résultat est littéralement respirable: aujourd’hui avec un tiers d’émissions de CO2 en moins! L’air a rarement été aussi propre.
D’ailleurs, aucun avion ne volera au-dessus de Pékin – l’aéroport sera fermé, et on ne verra que les 200 avions de combat dernier cri qui feront partie de la parade militaire. L’armée a d’ailleurs rusé pour écarter tous les oiseaux de l’espace aérien. C’est à peine croyable, mais des singes ont été dressés exprès pour détruire les nids d’oiseaux.
Rien ne doit venir perturber l’évènement
Mais les efforts du pouvoir central pour rendre cette journée mémorable ne s’arrêtent pas là. Les mesures de sécurité sont tellement strictes que les quartiers aux alentours de la place Tiananmen sont totalement bouclés ou carrément évacués comme nombre de bureaux et d’hôtels. Toutes les écoles, les musées, des centres commerciaux sont fermés – et même la Bourse, car rien ne doit venir perturber l’évènement. Les employés se sont d’ailleurs vus offrir 3 jours de congé. La Chine entière avec ses 1,4 milliard d’habitants aura donc le loisir d’admirer l’immense défilé militaire mis en scène par son armée
Avec ce défilé, la Chine bombe son torse pour montrer au monde sa puissance militaire et politique. Preuve d’une confiance retrouvée après l’humiliation infligée par le Japon pendant la guerre. Aujourd’hui, la Chine considère qu’elle n’a d’égal que les Etats-Unis, et qu’elle doit désormais être prise au sérieux sur la scène mondiale dans un contexte politique qui est assez tendu.
Ces derniers mois, les Chinois ont montré leurs muscles dans plusieurs conflits territoriaux : ils ont envoyé des navires de guerre dans la mer de Chine orientale ou encore dans la mer de Chine du sud, pour réclamer des îles inhabitées mais hautement stratégiques et riches en hydrocarbures. Le Vietnam, les Philippines, mais surtout le Japon en savent quelque chose.
Le Japon, grand absent de la cérémonie
Pourtant, la propagande officielle le martèle en effet depuis des semaines, Pékin n’arrête pas de dire que ce défilé ne vise aucun pays et sera un hommage à la paix retrouvée, 70 ans après cette guerre qui a fait entre 15 et 20 millions de victimes. Mais Tokyo a décliné l’invitation et sera le grand absent de cette journée, une journée qui selon le jargon officiel célèbre la « victoire de la guerre de résistance contre l’agresseur japonais ». Il est difficilement imaginable qu’un dirigeant japonais souhaite être dans les tribunes lors d’une telle commémoration.
Les Japonais seront donc absents, mais d’autres viendront. Dans les tribunes en face du portrait de Mao : les dignitaires communistes, mais aussi 30 chefs d’Etat et de gouvernement : la Russie, le Pakistan, la Corée du Sud ou encore l’Egypte ont répondu présent à l’invitation. En revanche, la démonstration de force place Tiananmen a dissuadé nombre de responsables occidentaux : en 1989, des chars chinois ont réprimé le mouvement des étudiants pro-démocratie ici. Parmi les pays de l’Union européenne, seul le président tchèque a fait le déplacement. La France sera représentée par son ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius.