@informateur- Depuis un certain temps, l’on assiste, sur les réseaux sociaux, à une avalanche de publicités de ‘’médicaments-miracles’’ censés guérir ‘’mille maux’’ à des coûts intéressants. Le hic, c’est que ces remèdes échappent à tout contrôle puisqu’ils ne sont généralement pas vendus en pharmacie. Mais, par le biais de circuits parallèles basés sur des commandes. Quelle garantie offrent-ils aux malades? État des lieux.
Par ces temps où de nombreuses personnes sont confrontées à des problèmes de santé induits, semble-t-il, par le nouveau genre de vie qui sédentarise en même temps que l’on consomme des produits dont la qualité n’est pas au-dessus de tout soupçon, les réclames de nouveaux remèdes sortis de nulle part a de quoi inquiéter sinon interpeler les autorités compétentes en matière de santé publique.
De fait, l’inventaire à la Prévert de ces réclames alléchantes qui inondent les réseaux sociaux depuis un certain temps est bien long. Des laboratoires et autre vendeurs de médicaments sortis d‘on ne sait où prétendent tout soigner ou presque ; des maladies métaboliques aux maladies cardiovasculaires en passant par les cancers, l’asthme, les antioxydants et les organes sensibles comme les reins, le foie, et les poumons. Des dizaines, voire plus de produits aphrodisiaques et de lutte contre la prostate sont vendus sur le réseau social facebook et s’arrachent comme de petits pains.
- Un business qui prend de l’ampleur
Bio Santé est l’une de ses pharmacies sur facebook qui déclare soigner plus de 135 maladies. Ces produits permettraient, entre autres, de restaurer les cellules malades, de rajeunir les vieilles cellules, d’affaiblir le virus du Sida en renforçant le système immunitaire. Tout comme Bio Santé, TYF Bio-Santé, une autre page facebook, soignerait également 136 pathologies dont les diabètes, l’hypertension, l’ulcère, la colopathie, les hémorroïdes, et le Sida. En analysant les offres de ces deux pages facebook on est tenté de dire que ce sont les mêmes auteurs qui ont créé ces pages afin d’aguicher le maximum de clients.
On a également «Distributeur agréé STC 30-Superlife». Ce produit présenté comme étant obtenu à base du plus puissant antioxydant qu’est le super oxyde dismutase (SOD) traiterait également plus de 135 pathologies. «Notre produit STC 30 est un remède bio venant de la Suisse. Ce sont des cellules souches, elles se régénèrent et réparent toutes les cellules endommagées du corps. Ce qui veut dire que toutes maladies visibles ou invisibles dans votre organisme sont prises en charge par ce produit et vous redevenez neuf et jeune pour poursuivre le cours de la vie. Elles te débarrassent de toutes toxines»,recommandent les promoteurs sur leur page publicitaire. L’autre laboratoire qui fait parler de lui, c’est bien «Ecorce Power»,spécialiste du sida, du diabète et de la lutte contre la stérilité. Ecorce Power affirme traiter avec «Fort-Renalben» l’insuffisance rénale en un mois pour un coût de 100.000 FCFA. A condition que le malade ne soit pas encore sous dialyse.
Consommons ivoirien, Saint Jean Paul Med Rech, Dkbio, Ivoir traitement naturel, Côte d’Ivoire santé naturelle, Iris Santé, Thé miraculeux, KBG group, le P’tit coin bio, thé bio thérapeutique, Klg shop, Heath et beauty, le Fermier, Bio fertilité, Lonny Holding, Allemagne Express, Phambio santé plus, Trésor Abbey bis,etc. Nous avons répertorié entre les mois de février et de mars 2023 plus d’une trentaine de pages Facebook sponsorisées en Côte d’Ivoire qui proposent des médicaments contre de nombreuses maladies. C’est à croire qu’après le démantèlement du marché de vente de médicaments à ciel ouvert de Roxy à Adjamé, facebook est devenu le nouveau réceptacle des commerçants de médicaments libres.
- Un marketing agressif
Le principe est simple. Les offres de médicaments sponsorisées sur facebook inondent votre page dès que vous vous connectez et la présentation des vertus des produits laisse rarement indifférents une population qui souffre de nombreux bobos. Les prix et les numéros de téléphones sont clairement affichés ainsi que le prix de la livraison selon que vous soyez dans le grand Abidjan ou à l’intérieur, pour ceux et celles qui veulent passer des commandes. Ces «pharmacies numériques» sont tellement sûres de leurs produits qu’elles n’hésitent pas à mettre au défi leurs éventuels patients avec des slogans du genre «un seul essai vous convaincra» ou encore «Si vous n’êtes pas satisfaits, on vous rembourse».
Parallèlement, il faut le reconnaitre, des témoignages foisonnent pour vanter l’efficacité des produits proposés. Ces témoignages sont-ils destinés à rassurer l’acheteur hésitant ou indécis? Comment peut-on être sûr que ces témoignages ne sont pas ‘’pipés’’, le but étant d’attirer le chaland pour en faire une proie facile? Cela est d’autant plausible que presque tous les témoignages sont généralement positifs. Comme si des personnes concernées s’étaient passé le mot. Loin de nous de jeter le discrédit sur un business qui emploie des centaines de personnes, nourrit des familles et soulagent certainement des malades.
Mais le fait que ce boom de publicités sur facebook autour des médicaments échappe à tout contrôle de la Direction Générale de la santé comporte un réel danger. Faut-il préciser que c’est à cette Direction que revient le rôle d’élaborer la politique de prévention et de gestion des risques liés aux maladies infectieuses ou aux pratiques de soins et de participer à sa mise en œuvre. C’est le lieu d’attirer l’attention du ministère de la Santé, de l’Hygiène publique et de la Couverture maladie universelle sur les risques que font courir aux populations les promoteurs de ces ‘’médicaments-miracles’’ sur Facebook.
- Le silence du ministère de la Santé
Autant le projet «zéro clinique illégale d’ici 2025» en Côte d’Ivoire enregistre un succès avec la fermeture chaque année de nombreuses cliniques sur l’ensemble du territoire, autant le ministre de la Santé, Pierre Dimba N’Gou, devrait-il lancer une opération de contrôle de la régularité administrative des promoteurs de la pharmacopée numérique et de la qualité des produits. Surtout que ce commerce s’adresse à un marché de plus de 4 millions d’utilisateurs de Facebook en Côte d’Ivoire.
Certes, on n’a pas encore officiellement signalé des cas de morts ou de dérapages liés à ces offres, mais faut-il attendre qu’il soit trop tard pour mettre de l’ordre dans ce qui ressemble à un vrai bazar? N’est-il pas temps de prendre le taureau par les cornes pour séparer le vrai de l’ivraie? En d’autres mots, ne faut-il pas inviter ces ‘’vendeurs numériques’’, puisqu’il est vrai qu’on ne peut les jeter tous aux orties, à se conformer à la réglementation en vigueur en faisant vérifier l’efficacité de leurs produits auprès de laboratoires agréés?
D’autant que face à l’insuffisance de l’offre de soins ‘’homologuée’’, il ne serait pas déplacé d’encourager ceux qui ont de vrais produits à soulager les patients en attente de solutions. Ce qui est en cause, on l’aura compris, c’est moins l’offre de médicaments que leur éventuelle nocivité ou inefficacité, le tout ramenant à un effet placebo. Il convient subséquemment d’assainir le secteur de la vente de médicaments en ligne. Il vaut mieux prévenir que guérir, dit-on.
ALI