@informateur.ci- Simone Gbagbo. Un nom qui ne laisse personne indifférent en Côte d’Ivoire. Un nom qui rime avec le combat du Front populaire ivoirien (FPI) dont elle a été un symbole naguère, aux côtés du président Laurent Gbagbo dont elle a partagé la vie et l’idéal politique pendant 30 ans, avant la rupture. Figure emblématique de l’opposition ivoirienne, Simone Gbagbo a eu un parcours exemplaire. L’ancienne Première dame est née le 20 juin 1949 à Moossou dans la commune de Grand-Bassam.
- La chrétienne-séminariste, la syndicaliste et la politique
Déterminée et énergique, elle est membre de la jeunesse estudiantine catholique dont elle dirige la branche féminine de 1966 à 1970, avant de s’engager syndicalement au sein du Synesci et du Synares où elle joue les premiers rôles dans les années 1970. En 1982, elle s’engage en politique et fonde dans la clandestinité, avec l’opposant Laurent Gbagbo qu’elle va épouser en 1889, et bien d’autres compagnons de lutte, le Front Populaire Ivoirien (FPI). Mais avant, en novembre 1988 Simone Gbagbo participe au congrès constitutif du FPI. Très active au sein des instances du parti, elle se distingue par son courage et sa vivacité.
Le 18 février 1992, elle prend part avec Laurent Gbagbo et les membres influents du FPI à une mémorable marche dans commune du Plateau. A la suite d’émeutes liée à cette manifestation, elle est arrêtée et détenue, avec son époux et d’autres cadres du parti, à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA) pendant 6 mois pour ‘’ tentative de subversion ‘’ avant d’être graciée par le Président Félix Houphouët-Boigny. Mais ces épreuves ne l’arrêtent pas. En 1994, elle est élue députée de la commune d’Abobo et devient Présidente du Groupe parlementaire FPI à l’Assemblée nationale. Respectée pour son charisme, elle s’affirme comme une redoutable bête politique.
Quatre années plus tard, le destin politique de Simone Gbagbo s’accélère. En effet, à la suite du coup d’Etat qui provoque la chute du Président Henri Konan Bédié, le 24 décembre 1999, son époux, Laurent Gbagbo dont elle partage l’idéal de Gauche, saisit l’occasion d’accéder au pouvoir. Elle est au cœur de sa campagne électorale pour la présidentielle du 20 octobre 2000. Le destin lui sourit car à la suite d’une élection agitée et sanglante, Laurent Gbagbo est élu Président de la République. Le 26 octobre 2000, Simone Gbagbo devient Première dame de Côte d’Ivoire.
- Simone Gbagbo, Première dame stigmatisée…
A partir de là, les regards se tournent littéralement vers elle. Dans la tempête de la crise politico-armée déclenchée à la suite du coup d’Etat manqué du 19 septembre 2002 qui se mue en une rébellion qui occupera la moitié nord du pays pendant dix années et qui mettra en péril le pouvoir de Laurent Gbagbo, cette femme de caractère dotée d’une forte personnalité est présentée par ses détracteurs comme l’inspiratrice de ‘’ l’aile dure ‘’ du parti. Elle est taxée d’ ‘’extrémiste ‘‘. Ce qui lui vaut d’être surnommée la ‘’ Dame de Fer ‘’. On la dit intraitable. On la soupçonne d’exercer une totale influence sur son époux et de lui dicter sa conduite.
On pense qu’elle impose sa volonté au sein du FPI qu’elle contrôle à travers une ligne rigide. Ses détracteurs la voient comme une partisane de la guerre, persuadés que le Président Gbagbo subit sa forte influence, sans rechigner. Tout ou presque sera dit sur Simone Gbagbo, tout le long du règne difficile de son époux, jusqu’à ce jour tragique du 11 Avril 2011 où son époux perdra le pouvoir. Selon des anecdotes jamais vérifiées, elle se serait montrée ‘’ intraitable, refusant que le Président Laurent Gbagbo quitte le pouvoir ‘’, même jusque dans les dernières minutes sous les bombes, dans la résidence du Chef de l’Etat baptisée ‘’ bunker de Gbagbo ’’.
- Après la chute et le calvaire, la renaissance
Après la débâcle, Simone Gbagbo sera placée, le 23 avril 2011, en résidence surveillée à Odienné, avant d’être détenue de façon préventive, dès le 1er décembre 2014, à l’Ecole de Gendarmerie d’Abidjan où elle endurera cette autre épreuve dans la dignité. En août 2011, elle avait été inculpée par la justice ivoirienne pour ‘’ vol aggravé, détournement de deniers publics, concussion, pillage et atteinte à l’économie nationale ‘’. En novembre 2011, son époux, Laurent Gbagbo, prenait le chemin de la Cour pénale internationale (CPI).
Dans la tempête de la crise politico-armée déclenchée à la suite du coup d’Etat manqué du 19 septembre 2002 qui se mue en une rébellion qui occupera la moitié nord du pays pendant dix années et qui mettra en péril le pouvoir de Laurent Gbagbo, cette femme de caractère dotée d’une forte personnalité est présentée par ses détracteurs comme l’inspiratrice de ‘’ l’aile dure ‘’ du parti. Elle est taxée d’ ‘’extrémiste ‘‘.
Dans l’épreuve, Simone Gbagbo ne s’est jamais reniée, n’a jamais abandonné l’idéal et les convictions qu’elle partageait avec son époux. En 2012, les autorités ivoiriennes refusèrent de la livrer à la CPI qui la réclamait, préférant la juger en Côte d’Ivoire. Après deux procès qui sont soldés par une condamnation en 2015 et un acquittement en 2017, pour des faits liés à la crise postélectorale de 2010-2011, elle est amnistiée le 6 août 2018, avant d’être libérée de l’Ecole de Gendarmerie d’Abidjan, le 8 août 2018. Simone Gbagbo n’exprimera aucune haine, aucun ressentiment, aucune rancœur à l’encontre du pouvoir en place, en dépit du calvaire qu’elle a enduré. Elle va plutôt renaître.
- Une Simone Gbagbo différente des clichés
Au contraire, le ton de son discours est à l’apaisement, à la réconciliation. C’est une Simone Gbagbo différente du cliché qui avait été présenté qui retrouve la liberté. Faisant mentir ses détracteurs. Rien de tout ce qui avait été dit sur elle ne transparaissait dans son attitude et ses déclarations. Elle a démenti l’image de la ‘’ Dame de Fer ‘’ et de ‘’ l’extrémiste ‘’ dont elle fut accablée, alors que certains attendaient d’elle un discours virulent à l’encontre du Président Ouattara après sa libération. Au point que d’aucuns se demanderont si elle n’avait pas été ‘’ approchée par le parti au pouvoir ‘’. Encore une autre anecdote.
En 2021, Simone Gbagbo prend à nouveau rendez-vous avec son destin. A son retour de la CPI qui l’a acquitté, le président Gbagbo demande le divorce, après 30 ans de vie et de lutte politique commune. Une autre vie commence alors pour l’ex- Première dame qui n’est pas femme à s’apitoyer sur son sort. Très vite, elle tourne la page et passe à autre chose. En août 2022, elle crée le Mouvement des générations capables (MGC), sans renoncer à son idéal socialiste. Après le divorce, c’est la rupture politique avec Laurent Gbagbo qui, lui, a lancé son nouveau parti, le Parti des peuples africain Côte d’Ivoire (PPA-CI).
- Simone Gbagbo, candidate à l’élection présidentielle : ‘’ Bientôt, vous m’appellerez Madame la Présidente ‘’
Le point commun dans cette affaire est que tous deux ont quitté le FPI, le parti qui les avait naguère réunis. Désormais, Simone Gbagbo mène sa barque de façon autonome avec ses partisans et assume pleinement, sans complexe, sa nouvelle trajectoire, sans aucune nostalgie de son parcours politique ou de sa vie passée avec son ex-mari. A 76 ans, Simone Gbagbo, mère de 5 enfants – toutes des filles – dont trois issues d’un premier mariage et deux avec Laurent Gbagbo, a franchi un autre palier. Elle est candidate à l’élection présidentielle du 2025 et a été honorée par le parti de Charles Blé Goudé, le COJEP, qui l’a adoptée en tant que sa candidate à ce scrutin.
Là encore, loin de la stigmatisation, c’est le visage d’une femme modérée qui apparaît aux yeux des Ivoiriens. Loin de la contestation et des revendications bruyantes de l’opposition, elle veut travailler à la paix, à la réconciliation des Ivoiriens. Et surtout à apporter sa pierre à la construction de l’édifice national, si elle est élue à la tête du pays. Elle ambitionne clairement d’être la première femme Présidente de la République de Côte d’Ivoire. Et elle affirme cette ambition avec beaucoup de conviction. ‘’ Bientôt, vous m’appellerez Madame la Présidente ‘’, prédit-elle.
Maurice Konan KOUASSI













