- Le Burkina a-t-il réellement pris la mesure d’un éventuel incident diplomatique, voire d’une crise ouverte avec son voisin «austral»
Informateur.info- Après le mandat d’arrêt international lancé contre l’ancien président du Faso, Blaise Compaoré exilé en Côte d’Ivoire, les nouvelles autorités burkinabés ont lancé, le vendredi 15 janvier dernier, un autre mandat d’arrêt contre le président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire Guillaume Soro. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’annonce du mandat d’arrêt international lancé contre le PAN Guillaume Soro par les nouvelles autorités burkinabé a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans le ciel jusque-là serein des relations ivoiro-burkinabé.
De quoi s’agit-il ? Faut-il rappeler que dans le courant du mois de novembre dernier, le nom du PAN a été cité dans une affaire pour le moins abracadabrantesques d’écoutes téléphoniques ayant un lien avec le pronunciamiento du 17 septembre 2015 qui a vu le général burkinabé Gilbert Diendéré s’emparer du pouvoir avant de le rendre sous la pression conjuguée de l’opinion nationale et des puissances occidentales dont la France qui ont modérément apprécié ce coup de force qui a failli contrarier la transition qui tirait vers sa fin. Ces fameuses écoutes téléphoniques supposées engager la responsabilité de Guillaume Soro dans ledit coup de force valent donc aujourd’hui à la l’ancien Premier Ministre de Laurent Gbagbo de faire l’objet d’un mandat d’arrêt international. Quelle histoire !
Faut-il aussi rappeler que cette mesure judiciaire intervient après le mandat d’arrêt international lancé par les mêmes contre l’ancien président Blaise Compaoré chassé du pouvoir par une insurrection populaire les 30 et 31 octobre 2014. Pour le coup, le Burkina Faso se trouve dans une situation totalement inédite. Puisque jamais, le pouvoir n’a lancé de mandat d’arrêt international ni contre un national, ni contre un étranger. Et pas n’importe qui : Guillaume Soro considéré, à raison comme le plus burkinabé des Ivoiriens. Mais, pourquoi cette crise d’urticaire et cette montée d’adrénaline aussi soudaine que gênantes ?
- C’est ce qui s’appelle se tirer une balle dans le pays
Dès lors, la question que l’on est amené à se poser trouve tout son sens : que recherchent donc les nouvelles autorités burkinabé en lançant ces mandats d’arrêt surtout celui contre Guillaume Soro, 2e personnalité de l’Etat de Côte d’Ivoire ? Les autorités burkinabè voudraient signifier à leurs homologues ivoiriens la fin des relations de bon voisinage entre les deux Etats voisins et frères, qu’elles ne s’y seraient pas prises autrement. On peut le déplorer. Cependant le pays a-t-il réellement pris la mesure d’un éventuel incident diplomatique, voire d’une crise ouverte avec son voisin «austral» ? Le doute est permis. Car, il est indéniable que les tenants du pouvoir au Faso n’ont pas pris en compte le sort des quatre millions de Burkinabè résidant en «basse Côte». Quelle serait la résilience du pays des hommes intègres face à l’invasion (ce qu’à Dieu ne plaise) de leurs ressortissants qui ne manqueraient pas de payer cher le dilettantisme voire le manque de tact de leurs dirigeants ? Passe que ceux-ci lancent un mandat d’arrêt contre Compaoré, l’un des leurs, mais qu’ils s’en prennent ainsi à Guillaume Soro est très certainement un coup de Jarnac contre la Côte d’Ivoire, ce pays frère et ainsi si cher aux Burkinabè. C’est ce qui s’appelle se tirer une balle dans le pays. Il faut espérer que le pouvoir de Ouagadougou réalise assez vite qu’il s’est engagé dans un cul de sac. Pour que les relations ivoiro-Burkinabé restent et demeurent ce qu’elles ont toujours été et qui en font un modèle de coopération sud sud : le bon voisinage.
Jean François Fall
Informateur.info