@informateur- Secrétaire général et Porte-parole de la Centrale Syndicale Agricole de Côte d’Ivoire (CSA-CI), Thibeaut Yoro a bien voulu se prononcer sur l’actualité dans la filière Café-cacao dominée par la mise en place en cours de l’interprofession. Entretien.
- La filière Café-cacao est agitée ces dernières semaines avec l’affaire du surpaiement d’une part et l’annonce subséquente d’une manifestation de protestation d’autre part. Quelle est la posture de la Centrale Syndicale Agricole?
La Centrale syndicale agricole estime que la décision du Directeur général du Conseil du Café-cacao concernant le surpaiement manque d’opportunité étant donné que les articles 17 et 18 du Décret sur la commercialisation n’interdit pas de payer le cacao au-delà du prix entrée usine qui est de 1080F/Kg. Ce qui est formellement interdit c’est de payer en dessous. Dès lors, les exportateurs qui paient le cacao au-delà de 1080FCFA/Kg entrée usine ne sont pas en infraction. Mais le Directeur du Conseil du Café-cacao explique sa décision par une volonté de protection des exportateurs nationaux qui ne peuvent pas tenir la compétition face aux multinationales. Le Conseil veut ainsi protéger une minorité d’acteurs face à la majorité des planteurs qui eux aussi reçoivent entre 1250 et 1300 FCFA/Kg. C’est dire que grâce au surpaiement les plus-values réalisées à l’international sont partagées. Et c’est cela que le Conseil du Café-cacao veut empêcher.
- Et qu’en pensez-vous?
Nous disons donc qu’il s’est mis en difficulté car il pourrait être accusé de travailler contre les producteurs, maillon faible de la chaîne. Or cette posture n’est pas vraie dans la mesure où il a déjà fait montre d’un réel engagement en faveur d’un revenu décent pour les producteurs. A ce sujet, il a beaucoup de réalisations à son actif. C’est pourquoi à la Centrale syndicale agricole, nous plaidons pour qu’il laisse ces supers bonus qui peuvent d’ailleurs motiver à venir vers les ports de San-Pedro et d’Abidjan. Ces bonus peuvent décourager la fuite du cacao vers les pays voisins puisqu’on sait tous que l’un des motifs de la fuite du cacao c’est bien le prix d’achat qui est meilleur ailleurs.
- Vous faites partie donc de ceux qui appellent le DG du Conseil du Café-cacao à «fermer les yeux» sur le surpaiement en raison du déficit des fèves cette saison et de l’envolée des cours à l’international. Pensez-vous qu’il est fondé de ne pas donner suite à cette requête?
Nous espérons seulement qu’il reviendra sur sa décision parce que cela sera à son avantage. D’ailleurs c’est bientôt une nouvelle campagne. On verra les prix qu’ils vont donner pour atténuer la grosse frustration due à notre système de commercialisation. Nous espérons au moins 1500 FCFA/kg.
- C’est dans ce contexte que des organisations professionnelles agricoles (OPA)- dont la vôtre était au premier plan- ont initié le 21 mars dernier une journée d’hommage au Chef de l’Etat. Quel était le sens réel d’une telle cérémonie à laquelle a pris part le ministre d’Etat, ministre de l’Agriculture et du Développement rural?
Non, ce n’était pas une journée d’hommage au Chef de l’Etat. C’était plutôt une journée d’informations et de soutien à la mise en place de l’interprofession Café-Cacao. C’est ce qui s’est passé le 21 mars dernier au Plateau.
- De l’interprofession, parlons-en! Le ministre Adjoumani a dit ce jour-là qu’avec sa mise en place les producteurs seront désormais consultés sur tout ce qui touche à la filière? En quoi consiste l’interprofession et comment se fera sa mise en place selon vous?
L’interprofession Café-Cacao réglera selon nous la question de la représentativité des producteurs dans les instances de décision et de gouvernance de la filière Café-Cacao. Sa mise en place est en cours. Nous sommes à la phase de l’identification des organisations professionnelles agricoles. Après on verra si on y va à des élections ou par consensus pour la désignation des représentants par région et département pour former le collège des producteurs.
- Beaucoup craignent que l’Etat ne place une ‘’marionnette’’ à la tête de l’interprofession et non un véritable représentant des producteurs. Pensez-vous que ces craintes soient fondées?
Non, ces craintes sont sans fondements. La Centrale syndicale agricole salue la mise en place en cours de l’interprofession Café-Cacao et pour l’heure nous espérons que les choses se feront dans les règles de l’art. On n’imposera personne en ce sens que c’est soit par une élection soit par un consensus. Ce sont les producteurs qui sont au cœur du processus je ne vois donc pas comment l’État pourrait imposer son choix? Nous avons confiance en ce processus puisque cela fait plus d’une décennie que l’Etat gère cette filière qui n’est pas sa propriété. Nous sentons qu’ils sont bien disposés à céder la filière aux planteurs. Au stade de l’avancée des choses, nous croyons à la sincérité des Gouvernants sur la question.
- Quel rôle la Centrale Syndicale Agricole entend jouer dans la mise en place de l’interprofession?
La Centrale syndicale agricole compte jouer un rôle de premier plan dans la mise en place de l’interprofession. Que ce soit par élection ou par consensus, nous aurons un rôle de sensibilisation mais aussi d’influence à jouer dans l’intérêt des planteurs que nous défendons en tant que syndicat.
- Un appel à lancer ?
L’appel que j’aie à lancer, c’est d’appeler à une mobilisation des acteurs de la filière Café-cacao en faveur de la mise en place de l’interprofession. La Centrale syndicale agricole sera bientôt en tournée dans les 13 régions de production du Café-Cacao pour informer, sensibiliser et donner des consignes claires.
Par Alfred SIRIMA