Contrebande : Les insaisissables réseaux de trafic du cacao ivoirien vers les frontières

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@informateur- En Côte d’Ivoire, la fuite du cacao qui représente près de la moitié des recettes d’exportation du pays, est une préoccupation de chaque instant, face aux réseaux clandestins qui se nourrissent de l’argent de l’or brun au préjudice des caisses de l’État. Malheureusement pour le cacao ivoirien, le marché informel du trafic a aussi sa loi : celle du plus offrant. C’est à l’heure où nous parlons le cas des pays frontaliers comme le Liberia et Guinée où le marché du cacao est un marché ouvert et quasiment non taxé. Ce qui exerce un attrait certain sur les acteurs de la filière et les circuits production dans les pays de la sous-région, principalement la Côte d’Ivoire qui reste le premier producteur mondial de cacao, en dépit d’une baisse de production qui s’est surtout fait ressentir lors de la campagne 2022-2023.

En 2023, le Conseil Café Cacao avait émis de vive inquiétudes face à ce phénomène qui a la peau dure, à cause du profit tiré du commerce illégal du cacao par les trafiquants. Lesquels prospèrent au Liberia et en Guinée où le kilogramme de cacao se négocie facilement de 4000 F CFA à 6000 F CFA, en raison de l’absence de taxe dans les réseaux et circuits illégaux. Alors que le prix bord champ du kilogramme de cacao est fixé en Côte d’Ivoire à 1500 F CFA – le niveau le plus élevé depuis jamais atteint en Côte d’Ivoire – pour la campagne 2023-2024, selon le mécanisme habituel du prix garanti aux producteurs. De quoi rendre particulièrement audacieux les contrebandiers et trafiquants de tous bords qui bravent toutes les mesures sécuritaires et les dispositions juridiques et douanières prises pour sanctionner les criminels économiques qui font perdre d’importantes ressources d’exploitation.

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Pour les finances publiques, les pertes en matière de recettes fiscales et douanières sont énormes. D’autant plus que chaque année, ce sont près de 200.000 tonnes d’or brun voire plus, qui filent entre les doigts de l’État ivoirien, pour se retrouver via la frontière dans les pays les plus attractifs cités plus haut. Certes le Ghana s’était trouvé impliqué dans le fuite du cacao ivoirien il y quelques années. Mais il préciser que la raison de la fuite du cacao ivoirien vers le Ghana ne fut pas seulement liée au prix du kilogramme de cacao au Ghana, mais à la mévente qui a sévèrement frappé en son temps le cacao ivoirien, dans un difficile contexte de normalisation et de reconstruction post-crise, à partir de 2011-2012.

Dans l’incapacité à ce moment là de vendre leurs produits, des producteurs ivoiriens, privés de revenus et affamés, s’étaient tournés vers les réseaux clandestins qui proposaient d’écouler le cacao au Ghana et ailleurs. Le phénomène a peu perduré car les deux pays voisins grands producteurs de cacao ont très vite accordé leur violon dans le cadre l’Initiative Cacao Ghana- Côte d’Ivoire. Il faut le savoir, le voisin ghanéen est aussi victime du phénomène de trafic de cacao. Les sources indiquent qu’en 2022 déjà, le Ghana perdait au moins 150.000 tonnes de cacao qui ont fuit par ses frontières. Soit presqu’autant que la Côte d’Ivoire. Les deux pays phares du cacao mondial ont d’ailleurs évoqué la question lors des dernières délibérations de l’Initiative Cacao Ghana-Côte d’Ivoire fin 2023, plus que jamais déterminés à unir leurs forces pour mettre fin à ce fléau qui cause tant de préjudice à l’économie des deux pays. Les solutions existent. Il faut veiller à la fixation d’un prix qui rémunère véritablement le travail des planteurs pour accroître leurs revenus, afin de les préserver de la tentation du trafic.

Le problème de la porosité des frontières qui facilite les activités des contrebandiers du cacao et des produits agricoles dans la sous-région doit également être résolu. A l’encontre des acteurs des réseaux clandestins de trafic de cacao, il faut prendre de mesures plus énergiques et plus dissuasives. Mais en Côte d’Ivoire, un pays où la corruption mine toutes les sphères de l’Administration publique et les milieux d’affaires douteux et règne même au sein des forces de l’ordre jusqu’au frontières, sans compter le blanchiment de capitaux, les flux financiers illicites et autres actes de malveillance financière qui restent souvent impunis malgré les efforts des autorités, viendra-t-on jamais à bout des trafiquants de cacao ?

KKM/informateur.ci

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